MENUMENU
Le terrain de chasse des « charos »
Mes allees et venues sur les lives (ou je ne montre jamais mon visage en direct) se font reis. Une fois acceptees, la plupart de mes interlocuteurs (masculins) tentent un timide « salut » . Certains, plus directs, me demandent « est-ce que tu nudes ? » . Ils me proposent alors de basculer sur Snapchat ou Instagram pour discuter et echanger des photos suggestives. Je commence a comprendre pourquoi YUBO a herite du surnom de « Tinder des ados » . C’est une plateforme qui donne le ton avant de passer aux choses serieuses.
« Cette application permet de lier des amities tres fortes via le chat et les lives mais elle permet aussi beaucoup de draguer en ligne » , m’explique Nora Bussigny, surveillante et chroniqueuse sur la vie des jeunes pour le journal Le Point. En fevrier 2019, elle a sorti un article qui a fait grand bruit. Elle y partageait que des lives prenaient la forme de « proces » . Les cibles privilegiees de ces tribunaux composes d’ados ? Les jeunes filles prises en flagrant delit de partage de nudes, ces photos denudees qui sont tres demandees par les garcons, souvent tres jeunes eux aussi. « L’application touchait beaucoup les lyceens. Elle est a present utilisee par des collegiens de 13 ans. C’est d’ailleurs assez perturbant de voir qu’ils sont obsedes a l’idee de se mettre en couple. »
Sur l’echange de photos suggestives ou denudees, Nora Bussigny m’explique pourquoi de nombreuses adolescentes sautent le pas. « Elles ont l’impression que YUBO, ce n’est pas la vraie vie. Elles entrent en contact avec des gens qui sont dans d’autres villes et elles draguent des garcons tout en etant a l’abri dans leur chambre. Il s’en degage un sentiment de securite et elles ne se rendent pas compte du danger potentiel. Les parents sont totalement largues par le phenomene. Ils sont tres stricts sur les sorties, mais ne se rendent pas compte qu’une ado laissee seule dans sa chambre avec un portable risque parfois plus que lorsqu’elle sort. »
En parallele des ados, des brouteurs et des journalistes infiltres, une autre population sevit sur YUBO : les charos (pour charognards). Il s’agit d’adolescents ou d’adultes masculins qui engagent la conversation avec un maximum de filles et leur demandent des photos nues ou suggestives. « Ces mecs se retrouvent ensuite sur des groupes prives sur Snapchat ou Instagram et partagent leur collection » , indique Nora.
Mais les p’tits jeunes ne sont pas dupes. Certains mettent au point des strategies pour prendre au piege les concernes.
En scrollant sur differents profils, je tombe sur une soi-disant jeune fille qui indique dans sa bio qu’elle est en fait un « daron de 30 piges avec 3 enfants » . Je decide de prendre contact avec elle (ou lui ? ), pour tenter de demeler le vrai du faux. La personne derriere ce compte commence par me dire que c’est une phrase pour eviter les dragueurs. Elle m’indique qu’elle a 13 ans. Apres lui avoir avoue que je suis journaliste, le discours change. L’utilisateur finit par m’expliquer qu’il est en realite un garcon de 16 ans qui « utilise les photos d’une pote pour pieger des charos » . Dans cette grande cour de recre masquee qu’est YUBO, tout le monde peut facilement jouer avec son identite et endosser plusieurs personnalites. Seules les videos live ou les comptes certifies, en echange d’une photo de sa carte d’identite, permettent de savoir reellement qui se trouve derriere un compte.
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